/!\ SPOILERS INSIDE /!\ Les photos et textes ci-dessous
révèlent des informations importantes sur le jeu !!!
Déjà écoulé à plus de 6 millions d’exemplaires, ce mastodonte du genre a pour rôle majeur de conclure la saga littéraire du Sorceleur d’Andrzej Sapkowski ainsi que la trilogie vidéoludique commencée depuis 2007 sur PC. L’autre évènement est la présence de l’héroïne principale : la princesse Cirilla Riannon, fille adoptive de l’incontournable Geralt de Riv. Ce tandem haut en couleur va nous faire vivre une épopée grand spectacle dans le meilleur RPG occidental jamais sorti.
Comme attiré par un doux parfum de lilas et de groseille à maquereau.
Tout commence à Blanchefleur, pas très loin de la cité de Wizima. Les territoires du nord voient leurs terres ruisseler de sang car Emhyr var Emreis, l’empereur légitime du sud veut étendre les frontières de Nilfgaard, sa nation. Les traités de paix n’ont pas tenu bien longtemps face à l’appétit vorace de ce conquérant implacable. La plupart des rois du nord ayant été assassinés, les nations sont tenues par la poigne du roi Radovid, sanguinaire à demi fou mais fin stratège. C’est sur des terres désolées où s’étendent charniers et arbres encombrés de pendus que Geralt de Riv et son mentor Vesemir suivent la trace Yennefer de Vengerberg, la magicienne ayant partagé jadis la vie du sorceleur.
C’est l’occasion de découvrir la réelle prouesse technique de ce RPG AAA avec ses environnements naturels dotés d’un photoréalisme édifiant. Après s’être familiarisé avec le gameplay et les cinq signes magiques (Ard, Igni, Yrden, Quen et Axii), on apprend que la région est terrorisée par la présence d’un immense griffon : du pain béni pour un sorceleur.
La bestiole tuée et quelques quêtes annexes effectuées (Le démon près du puit, climat incendiaire, Entre la vie et la mort, disparu au combat…) , les deux sorceleurs finissent par retrouver Yennefer à Blanchefleur, débarquant avec une troupe de soldats nilfgaardiens. Après une si longue séparation, la rencontre entre la ténébreuse magicienne et Geralt joue dans la sobriété : le temps presse, l’empereur Emhyr convoque notre mutant aux cheveux cendrés à Wizima pour une audience de la plus haute importance.
Le retour d’une hirondelle.
La rencontre au sommet entre Geralt de Riv et l’empereur Emhyr est particulière : ils sont liés par l’héroïne principale, la princesse Cirilla Riannon.
L’empereur (son véritable père) informe Geralt (son tuteur) que sa fille est revenue de son voyage à travers les âges et les époques. Comme la vie de Ciri n’est jamais simple, Emhyr révèle qu’elle est poursuivie par la chasse sauvage. Cette horde spectrale est composée d’elfes d’une autre dimension, dont le seul but est d’utiliser le pouvoir de la princesse afin d’exterminer l’espèce humaine dans les époques parallèles existantes : rien que ça. Sachant que Ciri n’a confiance qu’à Geralt, l’empereur s’en remet à lui pour la retrouver. C’est le début d’une grande odyssée où les choix moraux détermineront le destin des personnages principaux et secondaires.
Velen, la région de l’enfer.
Entre la multitude de villages paumés dans les coins les plus reculés voire les plus dangereux comme les marais et la guerre qui y fait rage, Velen n’a rien d’un petit coin de paradis. L’arbre du pendu se charge de nous souhaiter la bienvenue et c’est dans cette région dévastée que Geralt doit commencer son enquête pour retrouver sa fille. En passant par Boug-la-landes, le sorceleur voit vite sa piste s’orienter vers Perchefreux, le village fortifié du baron sanglant. C’est le seigneur local et il possède des informations importantes sur Ciri.
Gérer son scénario.
Visiter les îles Skellige nécessitant un bon level 16, il est évidemment préférable de commencer à monter ses niveaux et son équipement. Quelques contrats de sorceleur et diverses quêtes de bas niveau feront l’affaire en attendant de rencontrer la belle Keira Metz pour continuer l’intrigue principale. Même si elle aide Geralt dans un donjon pour venir à bout d’un membre de la chasse sauvage, la quête annexe la concernant devra imposer le choix de la tuer ou de la laisser vivre.
Avec un peu de diplomatie, j’ai préféré opter pour la seconde option permettant de retrouver Keira plus tard à Kaer Morhen, en guise de renfort face à une bataille très importante. On est toujours gagnant (ou presque) en refusant les effusions de sang. Par contre, j’ai fait un mauvais choix dans le scénario du baron sanglant et ce dernier se conclut de façon tragique.
Novigrad, une vraie cité médiévale, vaste et vivante.
C’est dans The Witcher 3 qu’on trouve la plus importante ville médiévale jamais développée. Il y a tellement de choses à y faire qu’on a l’impression par moment de faire un Shenmue à la sauce fantasy. Certaines portes se débloqueront au fil des quêtes. L’île du temple, l’immense port et le Passiflore (un bar à putes pour parler franchement) sont les endroits à ne pas manquer lors de la première visite.
C’est dans cette ville que Geralt va revoir Triss Merigold, célèbre magicienne du précédent épisode. Obligée de se cacher à cause de la chasse aux sorcières, la rouquine incendiaire ne va pas hésiter longtemps à accepter l’aide de son ancien amant (ou actuel, à vous de voir) et lui rendre la pareille pour sa quête de sauvetage envers Ciri.
Deux autres connaissances s’établiront plus tard dans la capitale portuaire du nord : le nain Zoltan et surtout Jaskier, célèbre barde ayant accompagné le sorceleur dans bon nombre d’aventures. L’artiste en poésie sert aussi de narrateur principal, une fonction qui lui sied à merveille.
L’archipel de Skellige : quand Skyrim rencontre The Wind Waker.
Après moult péripéties et un level 18 durement gagné, il est temps pour Geralt d’embarquer pour les îles nordiques. Rappelant la direction artistique du hit de Bethesda, la comparaison est inévitable. C’est beau, majestueux, vaste et inspire à la rêverie contemplative.
Les thèmes musicaux y sont excellents. Aux alentours des six îles se trouve l’accès magique permettant de rejoindre Ciri. Avant de s’y rendre, j’en ai profité pour faire la quête annexe sur Yennefer et soigner au maximum ma relation avec elle. L’issue amoureuse à la fin de l’histoire en dépend. Attention si vous jouez un double jeu avec Triss, les deux magiciennes vous le feront payer dans une séquence aussi culte qu’amusante. Et Geralt finira tout seul comme un con.
Le sorceleur et l’hirondelle : des retrouvailles attendues.
Séparés dans des circonstances tragiques à la fin de « La dame du lac », on peut dire que CD Projekt a soigné méticuleusement la scène des retrouvailles sur l’ile des brumes: pas une seule parole, juste la force des images qui exprime des émotions justes, touchantes sans en faire des tonnes.
On assiste fébrilement à l’évènement en se disant : « Ca y est, enfin ensemble ! ». S’ensuit une longue scène de dialogue que j’ai fait durer par pur plaisir. Cela dit, les plus impatients pourront abréger. Le retour de Ciri à Kaer Morhen lui permet d’enchainer les embrassades avec Vesemir, Yennefer (la couvrant de louanges sur sa beauté alors qu’elle la surnommait avant son « laideron » pour la taquiner) et Triss qui la considère comme sa petite sœur.
La bataille de Kaer Morhen : CD Projekt Red s’offre son gouffre de Helm.
La plus fantastique bataille du jeu permet de réunir toute la distribution de la saga, sous certaines conditions de vos choix. La mise en scène intense nous fait tracer cette séquence en une seule fois. Difficile voire impossible de la quitter tant qu’elle n’est pas conclue.
Avoir épargné Keira Metz m’a permis de profiter de sa boutique avec des artefacts de grande qualité à portée de main. La magicienne sauve également la vie de Lambert. On incarne à tour de rôle Geralt et Ciri, dans des combats spectaculaires et bien mis en scène. La confrontation Eskel/Caranthir est digne d’une œuvre fantasy grand spectacle. Nos yeux et nos oreilles sont aux anges… ou frémissent lorsqu’on assiste au déchainement psychique effroyable de Ciri, permettant de clore cette bataille éprouvante.
Pour Ciri, la vengeance est un plat qui se mange froid. Le meurtre de Vesemir se paiera dans le sang et elle réglera ses comptes au Mont Chauve en entrainant son cher Geralt dans ses bagages. Au menu: Imlerith, un général de la chasse sauvage et trois maléfiques Moires. On peut s'amuser de la partie pierre/papier/ciseau que se font Geralt et Ciri pour savoir qui va trucider quoi. Le sorceleur va se charger d'Imlerith tandis que Ciri affrontera seule les Moires.
La princesse Riannon est si puissante que le combat contre les sanguinaires sorcières n'est qu'une formalité (bilan: deux mortes et la rescapée optera pour la fuite!) tandis que le sorceleur se lance dans un duel au sommet. Développer son bouclier est très pratique vu que son énergie se régénère à chaque frappe de l'adversaire. Ca évite de se surcharger en nourriture. C'est grace à cette astuce que j'ai battu Eredin dans le combat final.
Le lien mystique et charnel entre les sorceleurs et les magiciennes.
La relation particulière qu’entretiennent les magiciennes avec les sorceleurs à travers le symbolique couple Geralt/Yennefer est un détail intéressant de l’univers de Sapkowski.
Tous les deux vivent bien plus longtemps que la durée normale humaine. Le contact physique entre deux personnes de ces clans provoque des réactions surprenantes, loin d’être désagréables : Triss et Eskel s’en rendent compte dans « le sang des elfes » tandis que le RPG donne naissance au couple Keira/Lambert.
Autre point commun : la stérilité. Cet handicap à procréer va développer l’amour parental de Yennefer et Geralt envers Ciri au point de former une famille hors-norme. L’impossibilité de donner la vie affecte Yennefer et cette frustration se ressent par moment dans les romans. Apprendre la magie à Ciri n’est pas seulement l’occasion de répondre au service demandé par Geralt, c’est aussi pour la belle brune l’opportunité de connaitre la tendresse et la complicité d’une jeune ado, que sa condition de magicienne lui interdit d’avoir.
Le bout du voyage.
Je suis tombé sur la fin que je voulais : Geralt vit avec Yennefer à Kaer Morhen tandis que Ciri devient impératrice. ! Et franchement c’était la meilleure solution : elle en a tellement chié depuis le début de son existence que ça ne m’emballait pas de la voir finir sorceleuse, avec un corps balafré de partout comme Geralt. Surtout qu’elle est déjà bien amochée au visage et aux bras. Le sorceleur Lambert le répète assez : « cette vie, c’est de la merde ! ».
Le choix de la souveraine est selon moi la meilleure fin avec une belle partie de chasse jouable à Blanchefleur, où Ciri est à 2 doigts d’être happée par un griffon, me confortant l’idée d’avoir renié son avenir de sorceleuse. Comme elle l’avoue à Geralt, si elle veut agir efficacement pour l’avenir des nations, ça sera plus facile sur un trône que dans une ruine crasse et oubliée, en chassant du monstre. La narration de Jaskier confirme ensuite que Ciri a toutes les qualités pour agir en grande reine avec l’héritage des qualités humaines de Geralt. Elle sera aussi capable de survivre dans ce milieu de requin avec l’instinct politique enseigné par son conquérant de père, l’empereur Emhyr. Et puis avec le pouvoir terrifiant qu’elle possède, qui osera la contredire ?
Inoubliable est l’adjectif le plus approprié pour décrire ce voyage au bout de l’horreur, où le choix de l’espoir peut surmonter celui de la fatalité. La fin de la saga du sorceleur est entre les mains du joueur : un luxe à ne surtout pas laisser passer.